Sur le fil

“Première dame”: un titre imaginaire révélateur de la dérive monarchique de la République.

 

Ce qui m’a le plus choqué dans l’affaire des « sales connes » :

  • Ce n’est pas la contestation par les néoféministes des décisions de justice, contestation que je ne partage pas. Certes elles le font d’une façon qui reste non violente et elles soulèvent de vraies questions. Mais je ne suis pas sûr que ça fasse avancer la cause. Je n’aime pas ces méthodes comme je n’aimais pas celles d’Actup autrefois et préférais soutenir Aides. Comme je n’aime pas la traduction de « Me too » par « Balance ton porc ».
  • Ce n’est pas l’expression vulgaire et méprisante de Brigitte Macron. Même si elle aurait dû s’excuser, sinon sur le fond, du moins sur la forme : cela aurait probablement éteint l’incendie. Et évité que cela devienne un slogan de ralliement. Maintenant c’est comme le sparadrap du capitaine Haddock et elle n’est pas prête de s’en débarrasser.
  • Ce n’est pas non plus le mensonge sur le caractère privé des propos : je l’avoue, le côté arroseure arrosée (involontairement) par son amie Mimi Marchand m’a amusé. J’espère que ça lui apprendra ce qu’il en coûte de trop jouer avec la presse people.

Non, ce qui m’a le plus choqué c’est l’usage systématique, pour désigner Brigitte Macron, du terme de Première dame et ce de tous les bords. « Une Première dame ne devrait pas dire ça » a-t-on entendu à l’envi. Or il n’existe pas de “Première dame”. Ni juridiquement, ni institutionnellement, ni républicainement. La République n’attribue ni rangs, ni couronnes, ni titres honorifiques par alliance matrimoniale. Elle s’en est même débarrassée avec la royauté. Cette notion est totalement contraire à nos institutions et révèle la vision monarchique qu’a de la République le couple Macron. Et je me désole qu’elle se soit imposée dans le débat public.

La République française se voit ainsi affublée d’un titre importé, un peu mondain mais parfaitement creux juridiquement. Un mot de communication qui tient lieu de statut. On nomme, on répète, et voilà : l’illusion d’une institution est créée. Magie du vocabulaire. Jusqu’au jour où l’on découvre qu’un rôle imaginaire produit des effets bien réels.

Pourquoi ne pas continuer ? Après la “Première dame”, viendront peut-être le “Premier beau-frère” ou la “Première cousine”. Autant rétablir, avec la maison du Roi, la Cour et ses usages.

Paris, Croulebarbe, le 14 décembre 2025

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