Chantiers, Sur le fil

Démocratie & Spiritualité, vers l’Université d’été.

Je suis intervenu hier devant l’Atelier Société et Spiritualités  du Grep Midi-Pyrénées, pour présenter Démocratie & Spiritualité et évoqué les partenariats possibles entre nos deux associations. Je reprends ici l’essentiel de mon propos.

Je dédie ce billet de blogue à Michel Rouffet

L’association Démocratie & Spiritualité a été créée en 1993 autour d’un petit groupe de personnes, dont Jean-Baptiste de Foucauld, conscientes de ce que la chute du mur allait laisser le capitalisme seul sans modèle alternatif qui le pousse à se réguler et de la nécessité pour les démocraties libérales d’avoir une force de rappel qui les tire vers le haut face au risque de n’être, comme le marché, la rencontre des désirs individuels, avec les risques de régression qui avaient été notés dés le début du 19ème siècle par Alexis de Tocqueville. Cette exigence de spiritualité pour les démocraties port aussi une exigence de démocratie pour les spiritualités, notamment pour les religions qui en sont les incarnations institutionnelles. Cette double exigence est le sens profond du &, l’esperluette, qui associe dans notre intitulé les termes de « démocratie » et de « spiritualité », l’un et l’autre au singulier.

Spiritualité au singulier, c’est la conviction, au-delà des références de chacun à des obédiences particulières, que celle-ci est une dimension constitutive de l’humanité. Que nous sommes à la fois partie de la biosphère -au travers de nos corps-, de la noosphère -au travers de nos pensées-, mais aussi d’une forme de pneumosphère, à travers ce que certains appellent l’âme[1] et qui ne se réduit ni aux corps ni à la pensée. Accessible par les corps et par la pensée, certes, mais surtout par la poésie ; comme le dit Edgar Morin « La vie n’a pas de sens, mais la poésie donne sens à nos vies »[2]. Cette dimension renvoie à ce qu’on peut appeler la vie intérieure et est à l’origine du premier engagement des membres de D&S défini dans sa Charte adoptée en 1993 : « S’efforcer de vivre de façon authentique et simple, en cohérence avec les exigences de son chemin intérieur. Cela peut être facilité par l’adoption d’une règle de vie personnelle, comportant à la fois travail sur soi, écoute de l’autre et partage avec les plus faibles ».

Une spiritualité qui s’exprime cependant dans des spiritualités : « Il faut en parler au pluriel, puisqu’il y en a à l’évidence plusieurs, fort nombreuses et souvent fort différentes les unes des autres. Toutefois le pluriel, ici comme ailleurs, suppose le singulier. Il n’y aurait pas de spiritualités, au pluriel, si elles n’avaient toutes quelque chose en commun, qui justifie la communauté du nom et le singulier du concept. »[3]. C’est ce qui explique le deuxième engagement visé par la Charte : « Apprendre à connaître et respecter les autres formes d’expériences et de spiritualité que la sienne et faire de ce dialogue un support de son propre cheminement ». C’est ce que nous avons appelons l’interconvictionnalité. Interconvictionnalité qui n’est pas réductible au seul dialogue interreligieux, ni même interspirituel. Nous accueillons des personnes de toutes convictions, religieuses, mais aussi non religieuses, philosophiques, idéologiques, politiques ou autres, dès lors qu’elles respectent les principes républicains, notamment la fraternité, fraternité universelle et non réduite aux acquêts de la nationalité.

Cet engagement démocratique et spirituel nous conduit à participer au débat public, à « participer, sous une forme ou sous une autre, à l’élaboration d’analyses et de propositions sur les sujets qui interrogent la relation entre démocratie et spiritualité », comme l’indique le troisième engagement visé par la Charte : c’est notre fonction de « laboratoire d’idée », avec cette approche qui nous est spécifique de conjuguer l’aspiration démocratique et l’inspiration spirituelle. Dans ce domaine, il s’agit moins de définir des positions communes que de fournir des éléments de réflexion et de discernement qui permettent aux uns et aux autres de se positionner dans les débats du moment, de cultiver en quelque sorte le courage de la nuance[4].

« Soutenir ou promouvoir, dans son activité professionnelle ou civique, des actions concrètes reposant sur une inspiration éthique ou spirituelle », tel est le quatrième engagement défini par la Charte. C’est une invitation à concrétiser nos travaux dans nos engagements citoyens mais aussi professionnels. Engagement d’abord personnel, mais aussi collectif et c’est ce qui nous a conduit à créer en 2011, avec nos partenaires de La  Vie Nouvelle (LVN) et de Poursuivre, le Pacte civique dans lequel nombre de nos membres sont également engagés.

Démocratie & Spiritualité se définit comme une « instance commune de réflexion et d’action », s’adressant notamment « aux personnes qui se reconnaissent une responsabilité d’acteurs dans la vie sociale ». « Elle souhaite favoriser un dialogue entre décideurs, acteurs sociaux et intellectuels que ces questions interpellent ». D&S se définit comme une « association de deuxième niveau » une « méta-association » regroupant des personnes et associant des associations partenaires qui souhaitent pouvoir partager et capitaliser sur leurs expériences dans les différents domaines concernés par la démocratie et la spiritualité.

Cela nous a conduit, depuis quelques années, à développer une approche thématique, dans le cadre de groupes de travail. Certains de ces travaux ont, depuis, fait l’objet de publications dans le cadre de la collection « Démocratie & Spiritualité » que nous avons créée avec notre partenaire Les éditions de l’atelier :

  • « Des raisons d’espérer – Des ressources spirituelles face aux défis actuels »[5], sur la démarche interconvictionnelle.
  • « Dialoguer avec la Terre – Renouer les liens entre les générations pour préserver notre maison commune »[6] sur la question environnementale.
  • « Laïcité et spiritualité – Vers un nouvel équilibre »[7] sur la question de la laïcité.
  • « Logique de pouvoir et éthique – Des ressources spiritielles pour l’exercice des responsabilités »[8] sur la question des rapports entre éthique de conviction et éthique de responsabilité.

 

D’autres travaux sont en cours autour des thèmes suivants :

  • « Spiritualité(s) : archipel ou bien commun ? » en partenariat avec le Forum 104 dans le prolongement de nos travaux sur l’interconvictionnalité.
  • « A l’écoute des jeunes » avec le souci d’écouter ce qui se joue au sein des pljus jeunes générations que les questions de la politique, de la spiritualité et de l’engagement.
  • « Quelle place pour l’hospitalité dans nos sociétés ? », en partenariat avec l’association Compostelle Cordoue, en élargissant la focale à partir de la question migratoire.
  • « Quelle société nous prépare le numérique et l’intelligence artificielle ? » avec comme objectif de promouvoir un numérique à visage humain en partenariat avec La Vie Nouvelle.
  • « La fraternité : valeur cardinale de la République » dans le cadre du labio de la fraternité et du collectif du 4 février.

 

Nous sommes au cœur d’un réseau d’une trentaine de partenaires nationaux et participons sur l’Ile de France à la Coordination interconvictionnelle du Grand Paris, notamment à l’occasion de la journée internationale de la Fraternité le 4 février et de la journée internationale du vivre en ensemble dans la paix, le 16 mai. Des groupes locaux, qui concrétisent aussi ces partenariats localement se sont constitués à Nantes et à Grenoble et participent également à des événements locaux.

Nous organisons régulièrement des réunions conviviales en mode mixte, i.e. en présentiel au Forum 104 à Paris et en visio, autour de nos thèmes de réflexions. Les dernières ont concerné :

  • L’évolution des relations internationales, avec Bertrand Badie
  • La question migratoire, avec Gérard Moreau
  • La question de la fin de vie et son traitement démocratique avec François Stasse.

Les prochaines porteront sur :

  1. La personnalité d’Abd el-Kader avec Karima Berger, auteure de « Abd El-Kader : L’Arabe des Lumières »
  2. Communisme et spiritualité avec Valère Staraselski auteur de « Les passagers de la cathédrale»
  3. Actualité des spiritualités juives avec Philippe Haddad.

Nous publiions régulièrement une lettre[9] qui est diffusée à nos adhérents et sympathisants et permet d’échanger entre nous et à laquelle il est possible de s’abonner gratuitement ;

Enfin, et peut-être surtout compte tenu des évolutions nationale et internationales, nous consacrerons notre Université d’été qui se tiendra du 5 au 7 septembre au Centre spiritain de Chevilly Larue autour des questions posées par la crise de la démocratie autour du thème « Un nouvel humanisme pour réinventer la démocratie ». Au-delà des questions institutionnelles, nous viserons une analyse en profondeur, anthropologique, spirituelle, personnaliste, humaniste de la démocratie pour tenter de lui redonner du sens pour le temps présent.

Vous pouvez vous inscrire Université d’été 2025 – Démocratie & Spiritualité

Toulouse, Place du Capitale, le 11 juillet 2025

[1] François Cheng De l’âme

[2] Edgar Morin Sur l’esthétique – Edgar Morin – Babelio

[3] André Comte Sponville  L’opportunité de vivre : Ultimes études. 

[4] Jean Birnbaum Le courage de la nuance

[5] Coordination Michel Ray Des raisons d’espérer : Ressources spirituelles face aux défis actuels – Babelio

[6] Coordination Michèle Bernard Royer et Marie Odile Terrenoire Dialoguer avec la terre – Renouer le lien entre les générations : Vers un nouvel humanisme planétaire

[7][7] Coordination Sébastien Doutreligne et Marcel Lepetit Laïcité et Spiritualité

[8] Coordination Jean-Baptiste de Foucauld et Marcel Lepetit Logique de pouvoir et éthique

[9] La lettre de D&S – Démocratie & Spiritualité

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