Chantiers, Sur le fil

Un tour de France pour une « agriculture digne »

Le 26 août se sont retrouvés à Flavin, à côté de Rodez, sur la ferme d’Olivier un agriculteur de 24 ans, quarante-cinq jeunes de dix-huit à vingt-neuf ans pour un Festiv’ Agricole qui est venu conclure le quatrième Tour de France du même nom organisé sous l’égide du MRJC.

En fait de Tour de France, ce sont trois itinéraires, l’un partant de Nancy, le deuxième d’Angers et le troisième d’Albi, qui ont convergé vers le chef lieu de l’Aveyron,  et qui ont permis à une quinzaine de jeunes, étudiants ou juste entrés dans la vie active, et qui envisagent de faire de l’agriculture leur métier de confronter leurs convictions agroécologiques avec la réalité vécue par une douzaine d’agricultrices et d’agriculteurs.

La mise en scène de ces trois itinérances a aussi été l’occasion d’un échange sur les questions cruciales de l’installation et du mal-être agricoles ; des questions qui sont au cœur du manifeste  « Pour une agriculture digne » élaboré à l’issue des trois premiers tours de France agricole, et qui, avec seize propositions, renoue avec l’inspiration qui avaient été celle de la JAC (Jeunesse agricole chrétienne) des années cinquante et soixante, mais dont la mystique du « Voir, juger, agir » s’est dégradée en politique productiviste quand ceux qui en avaient été nourris ont pris les rênes des grandes organisations professionnelles agricoles.

Seize propositions qui déplacent le lampadaire vers les zones d’ombre de l’agriculture française : comme, par exemple, celle d’un statut d’intermittent du travail agricole pour ce quelque million de personnes, saisonniers, temporaires ou détachés qui représentent une part croissante et indispensable de la main d’œuvre des 400 000 exploitations qui subsistent; ou encore celle d’un statut de paysan-chercheur, qui permette de reconnaître et d’organiser la contribution des agriculteurs et des éleveurs à l’amélioration des connaissances agronomiques ; sans  parler d’un statut des agricultrices qui n’est pas encore totalement aligné sur celui des agriculteurs, dans les faits ou même en droit.

Nombre de ces propositions renouent avec la tradition coopérative et mutualiste en agriculture et visent à promouvoir la dimension collective des métiers agricoles, que ce soit dans l’attribution des terres, dans les outils de transformation et de commercialisation des produits alimentaires, ou même dans le statut des exploitations elle-même, en faisant la promotion de formes coopératives, au moment où un nombre de plus en plus important d’entre elles prennent la forme de sociétés de capitaux. Avec le souci au passage de gérer le risque principal pour ces sociétés de personnes, les relations interpersonnelles, en mettant en place une « médiation agricole ».

Inspirée par un fort engagement citoyen, le projet vise aussi à retisser le lien entre la civilisation urbaine qui est la nôtre et l’agriculture, que ce soit dans son financement, par l’institution d’un service civique paysan, ou d’un soutien agricole volontaire, le tout débouchant sur un projet de réappropriation démocratique de notre alimentation.

Seize propositions, très concrètes donc, qui ne font peut-être pas à elles seules une politique agricole mais  dessinent la nouvelle utopie d’une agriculture réconciliée avec la société et avec la nature.

Rocamadour, le 3 septembre 2023

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