Bref !

Le darmanisme, la dérive libéral-totalitaire du macronisme ?

Le Conseil d’État a suspendu en référé la dissolution des Soulèvements de la Terre. Qu’on partage ou non les stratégies politiques des Soulèvements de la Terre, on ne peut, au nom de la défense des libertés publiques, que se réjouir de la décision prise en référé par la haute juridiction administrative de suspendre l’application du décret du 21 juin dernier prononçant la dissolution du collectif écologiste. Et on espère que la haute assemblée confirmera au fond « le doute sérieux » qui pèse sur la légalité de la décision gouvernementale.

Mais au delà de ce texte heureusement suspendu, on peut aussi s’interroger sur la stratégie juridique du ministre de l’intérieur, si l’on rapproche cette tentative de dissolution d’un mouvement qu’il avait abusivement qualifié d’écoterroriste, avec d’autres décisions dont les motivations profondes sont peut-être bien différentes des motifs avancés.

Ainsi au motif de  lutter contre les atteintes aux personnes et aux biens en agriculture, ce qui est évidemment incontestable, il avait également confié aux cellules Déméter  créées en 2019 au sein de la Gendarmerie Nationale la prévention des « actions de nature idéologique » (une façon de pénaliser en quelque sorte ce que certains dénoncent sous le terme d' »agribashing ») ; ce à quoi, par un jugement du 1er février 2022, le tribunal administratif de Paris a d’ailleurs enjoint le gouvernement de mettre fin.

Ainsi le contrat d’engagement républicain prévu dans la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République (plus connue sous son appellation d’origine darmanienne de « lutte contre le séparatisme ») et qui visait initialement à promouvoir le respect des principes de laïcité par toutes les associations et à lutter contre les dérives islamistes[1], est-il utilisé aujourd’hui par les préfets pour contester les subventions accordées aux associations qui font la promotion de la désobéissance civile comme forme d’action non violente.

Là aussi, on peut ne pas partager ce mode d’action politique, mais cela ajoute aux « malheurs du monde » de le « mal nommer » « écoterrorisme », y compris en banalisant ce mot terrible de « terrorisme » (les victimes du vrai terrorisme apprécieront !). Et l’on sent également la tentation, derrière ces discours et initiatives, de mettre en place une police idéologique … ce qui en revanche est bien une caractéristique des régimes totalitaires.

Entre Le Fayet et Paris, le 12 août 2023

 

[1] Pour ma part, si j’en partageais l’objectif, j’en avais contesté la forme réglementaire -ce qui a d’ailleurs été repris dans l’avis rendu par le Conseil national des villes (CNV) sur le projet de loi- lui préférant des instruments de droit souple, comme la Charte de la laïcité que j’avais mise en place avec les associations pour la branche Famille de la sécurité sociale.

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