Malgré ses dénégations le Canard enchainé a confirmé la participation le 8 mai de Sophia Chikirou à une manifestation pro Poutine, à l’occasion de la célébration de la victoire contre le nazisme. Certes, ce n’était pas, comme on l’a cru un moment, celle organisée par le mouvement souverainiste, complotiste et antieuropéen de Jacques Cheminade, mais celle organisée un peu avant sur le même parcours, de la République au Père Lachaise, par le mouvement de la Paix et pour le même motif : la « Marche du régiment immortel », une initiative russe pour célébrer la « grande guerre patriotique » et récupérée par le pouvoir poutinien. Ceinte de son écharpe tricolore elle n’a pas hésité à qualifier de provocation le projet d’adhésion de l’Ukraine à l’Otan et à l’UE, reprenant les éléments de langage du pouvoir russe. Cela n’a pas du gêner beaucoup Jean-Luc Mélenchon qui avait participé le 9 mai 2018 à cette même marche à Moscou.
Des trois drôles de dames de Méluche, avec Mathilde Pannot et Danièle Obono, Chikirou est la première, la « femme du chef » comme, selon « La Meute », elle aime à se définir elle-même. A tel point que d’aucuns l’assimilent à Jing Quiang, l’impératrice rouge, la dernière épouse du « Grand timonier ». Une référence maoïste qui n’est pas sans faire sourire de la part d’un mouvement créé pour soutenir un ancien trotskiste, quand on se souvient à quel point ses deux tendances sectaires de l’extrême gauche des années soixante-dix pouvaient s’agonir. Mais ce n’est pas nécessairement pour déplaire au Lider Maximo de LFI qui ne cache pas son admiration pour les régimes autoritaires, celui de la Chine de Xi Jin Ping, autant que celui de la Russie de Poutine. La Chine qui le fascine depuis une visite quand il était secrétaire d’Etat de Lionel Jospin, allant même jusqu’à soutenir en 2022 le projet d’une « seule Chine », i.e. l’annexion de Taiwan.
Il faut bien le dire, « La Meute » n’est pas un très bon livre. Comme Davet et Lhomme auxquels ils font référence, les auteurs alignent les anecdotes et les propos rapportés au détriment de l’analyse. Mais ce travail d’investigation illustre les mécanismes qui font de LFI, non pas, comme on le dit souvent, un « mouvement gazeux », mais un instrument extrêmement efficace au service des ambitions d’un homme : une armée, une secte, une famille, au sens mafieux du terme, avec tout ce qui, des vexations aux exclusions, permet de maintenir l’autorité du chef et de son projet électoral. Un projet électoraliste, bien plus que populiste, qui conduit l’ancien laïque à des positions pour le moins ambiguës sur l’islamisme et l’antisémitisme, en espérant récupérer dans les banlieues l’écart de voix qui ne lui a pas permis d’accéder au deuxième tour en 2017 comme en 2022.
Un mouvement qui ne brille pas par son respect de la démocratie, comme on a déjà eu l’occasion de le dire ici. Ce qui fait douter des engagements de son « chef » à promouvoir une sixième République plus démocratique, lui qui, selon l’une de ses (ancienne) proches, n’arrive pas « à penser en dehors de la Vème ». Comme son idole Mitterrand.
A la lecture on ne peut s’empêcher de ressentir une certaine tristesse pour l’évolution de Jean-Luc Mélecnchon : sauf la première dame, il s’est coupé de ses amis, et les adultes dans la place qui jouaient un rôle de force de rappel sont morts ou ont été exclus. Toute ressemblance avec quelque autre personnage est purement fortuite. A ceci prés que face à la responsabilité des relations internationales ou de déclencher le feu nucléaire son imprévisibilité et son attrait pour les régîmes autoritairesle rapproche plus d’un Trump que d’un Macron.
Paris, Croulebarbe, le 25 mai 2025
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