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Pédocriminalité dans l’Eglise : vers une commission indépendante ?

Avec Christine Pedotti, Anthony Favier, Jean-Marc Salvanès et Jean-François Rouzières, de Témoignage Chrétien, j’ai signé dans Libération de ce jour, une tribune appelant à la mise en place d’une commission réellement indépendante et transparente sur la question pédophile dans l’Eglise catholique, sous le titre « Pédocriminalité dans l’Eglise : vers une commission indépendante » (j’avais proposé « Ponce-Pilate sors de corps épiscopal ! » -voir addendum- titre qui n’a finalement pas été retenu).

Pédo-criminalité dans l’Eglise : vers une commission indépendante ?

ou

Ponce Pilate, sors de ce corps épiscopal !

 

Si à Lourdes, la Conférence des évêques de France décide de mettre en place une instance pour établir la vérité sur la question pédophile dans l’église catholique, elle devra être réellement indépendante et transparente.

Tribune. Plusieurs déclarations laissent penser que la conférence des évêques de France, réunit à Lourdes jusqu’à jeudi, pourrait décider de mettre en place une instance chargée de faire la vérité sur la question pédophile dans l’Eglise catholique. Peut-être n’est-ce qu’une façon d’éviter que la commission d’enquête parlementaire, refusée par le Sénat ne soit reprise par l’Assemblée nationale. Mais après tout, l’esprit souffle où il veut, et peut-être l’épiscopat a-t-il enfin compris que sa politique de l’autruche empoisonne l’Eglise de l’intérieur et qu’il est temps de «faire la vérité» comme le souhaite l’immense majorité des Françaises et des Français et surtout des catholiques pratiquants.
Mais on reconnaît aussi l’arbre à ses fruits, et il ne suffit pas de mettre en place une commission dite indépendante pour que ce travail de vérité soit fait. La commission Christnacht créée il y a deux ans le montre bien. Deux conditions sont essentielles pour qu’une telle instance puisse faire ce travail de vérité : qu’elle soit totalement indépendante et qu’elle travaille dans la transparence. Indépendance : c’est bien sûr d’abord les conditions de désignation des membres et notamment de la personne chargée de la présider et d’en organiser les travaux qui la garantiront. Si les évêques veulent vraiment une commission indépendante, ils doivent déléguer la nomination de ses membres à une autorité indépendante car, sur ces sujets, il y a trop de conflits d’intérêts au sein même de l’épiscopat pour que sa désignation par les évêques soit crédible. Indépendance : cela suppose aussi des moyens financiers et matériels, pour fonctionner, pour enquêter, pour mobiliser des expertises. Ce professionnalisme ne peut reposer sur le bénévolat et comme les investigations risquent d’être longues, un mode de financement adéquat devrait être prévu.
Transparence : de l’épiscopat vis-à-vis de la commission d’abord. Les évêques, comme le Vatican, doivent s’engager à ouvrir leurs archives, à informer spontanément la commission sur toutes les situations dont ils ont pu avoir connaissance et à répondre aux convocations de la commission. On peut légitimement s’inquiéter lorsque l’on voit l’ancien évêque d’Orléans se «faire porter pâle» devant le tribunal correctionnel qui le jugeait pour non-dénonciation de crimes pédophiles, le Vatican s’abriter derrière l’immunité pour protéger le préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, ou le père Pierre Vignon être relevé brutalement de ses fonctions. On sait qu’en Allemagne, le seul pays où une telle instance a été mise en place à l’initiative de l’épiscopat et non dans un cadre civil, ses membres se sont plaints que beaucoup d’informations leur avaient été cachées.
Transparence de la commission vis-à-vis du public. Les auditions doivent être publiques, sauf si les faits sont en cours d’instruction. La commission doit avoir pour objectif de remettre un rapport public lui aussi, et devra rendre régulièrement compte de ses travaux. Elle devra, bien sûr, transmettre à la justice les affaires dont celle-ci n’aurait pas eu connaissance, de sorte que, parallèlement au travail de vérité, le travail de justice aille également à son terme. Ce sont ces deux conditions, indépendance et transparence, qui nous ont conduits à demander la création d’une commission d’enquête parlementaire.
Messieurs les évêques, vous devez la vérité aux victimes, aux innocents – tous les prêtres injustement soupçonnés – à tous les catholiques et à l’Eglise.

Christine Pedotti, écrivaine, journaliste , Anthony Favier, historien , Daniel Lenoir, haut fonctionnaire, ancien président de la CNAF(1) , Jean-Marc Salvanès, chef d’entreprise et Jean-François Rouzières, psychanalyste

Paris, le 7 novembre 2018

(1) Libération s’est trompé. C’est bien sûr en tant qu’ancien DG de la Cnaf que j’ai signé cette tribune.

 

Addendum :

Pour expliciter le titre « Ponce Pilate sors de ce corps épiscopal », la chute était un peu différente : « Messieurs les évêques, il n’est plus temps de se demander « qu’est-ce que la vérité  ?» et de se laver les mains des crimes dont vous vous êtes rendus complices. » 

 

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