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La fraude nuit gravement à la solidarité…suite

Je présente le 1er juin à la presse et le 2 juin au Conseil d’administration, les résultats de l’année 2014 en matière de lutte contre la fraude aux prestations versées par les Caf. Au regard des objectifs que j’avais annoncés l’année dernière, les résultats sont encourageants, même s’il reste encore beaucoup à faire pour lutter contre ce que j’avais appelé, en prenant mes fonctions, « le cancer de la solidarité ».

 La fraude nuit gravement à la solidarité…suite

 En 2014 les Caf ont augmenté de 50% la fraude détectée : 56% si l’on regarde le nombre de fraudes détectées, 48% si l’on regarde les montants 1. Il s’agit là d’une croissance sans précédent des montants détectés.

Evolution de la fraude détectée (en nombre et en montants) de 2004 à 2014

Evolution de la fraude détectée de 2004 à 2014

Ce chiffre ne doit pas être mal interprété. Ce n’est pas la fraude qui a augmenté, c’est la détection de la fraude qui a été fortement renforcée.

La fraude quant à elle n’a pas augmentée. La branche Famille réalise depuis 2008 et maintenant tous les ans (depuis 2013) une évaluation statistique sur la qualité des paiements (paiement à bon droit) et sur la fraude 2. Celle-ci montre que la fraude n’augmente pas : entre 2012 et 2013 elle reste à un taux compris dans une fourchette de 1,4% à 2% des quelques 85 milliards de prestations versées. Nous n’aurons que l’année prochaine les chiffres pour 2014, mais tout laisse à penser que la fraude effective n’a pas plus augmenté en 2014 non plus 3.

Les types de fraudes restent aussi très stables. L’essentiel – 70% – est dû à des omissions ou à des déclarations erronées, notamment sur les ressources (la distinction entre un retard de déclarations et un oubli volontaire, et donc frauduleux, est un des sujets principaux de la qualification fraude). Seules 7% des fraudes résultent de l’usage de faux ou d’escroquerie. Le montant moyen a diminué passant de 6 756 € en 2013 à 6 386 € en 2014 ce qui est important certes, mais l’est beaucoup moins que celui d’autres types de fraudes 4 et témoigne aussi de l’augmentation de la fraude dite « de survie ».

C’est ce qui explique que, si les fraudes sont de plus en plus souvent sanctionnées (99,1%), la Branche a aussi mis en place un dispositif de sanction graduée passant du simple avertissement (plus d’un tiers des cas mais avec sanction plus lourde en cas de récidive), aux pénalités financières prononcées directement par les Caf, puis aux poursuites pénales.

Il faut également souligner que, détectées ou pas, la plupart des sommes fraudées sont récupérées par les Caf. En effet, les fraudes ne sont qu’une partie des indus 5 versés par les caisses. D’autres résultent d’erreurs (non frauduleuses) des allocataires ou sont de la responsabilité des caisses elles-mêmes : soit du fait d’erreurs proprement dites de la part des caisses (le taux, faible, a diminué d’un tiers en 2014), soit surtout de l’effet mécanique de la date de calcul de la prestation, qui est antérieure à la date de connaissance d’une nouvelle source de revenu 6. Près de 70% de ces indus, (y compris les fraudes) sont récupérés auprès des allocataires. Concernant les indus frauduleux, seule une partie (21% en 2014) sont qualifiés comme tels.

L’objectif est bien sûr d’augmenter ces deux taux, même s’il serait illusoire de vouloir qualifier de façon exhaustive tous les indus frauduleux 7.

L’indentification de ces indus passe principalement par les échanges d’informations avec les autres administrations (Impôts, pôle emploi, notamment) qui permettent de vérifier la justesse des déclarations d’avantage que les pièces justificatives, qui sont, pour cette raison, de plus en plus éliminées, au profit de déclaration qui peuvent être vérifiées, et donc sanctionnées quand elles sont fausses) : c’est le passage « de la pièce justificative à la donnée justificative ». L’amélioration de la lutte contre la fraude résulte également de celle des méthodes de ciblage, reposant sur les techniques dîtes de « data mining » 8. Nos enquêtes statistiques permettent d’améliorer régulièrement nos modèles et de rendre nos contrôles de plus en plus efficaces. Cet effort sera évidemment poursuivi.

L’objectif est surtout de faire de la prévention, d’abord par l’effet dissuasif d’une politique de contrôle de plus en plus efficace. Par l’information et la communication aussi. En effet, l’opinion a tendance à penser que nous n’agissons pas assez contre la fraude 9. Contrairement à cette idée reçue ce n’est pas vrai, et il faut le faire savoir. A la fois pour rassurer ceux qui le craignent et pour que ceux qui seraient tentés de s’y prêter sachent qu’ils risquent de plus en plus d’être identifiés et sanctionnés.

 

Paris, le 2 juin 2015

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