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Les maisons de service au public

Dans le cadre du grand débat, dans son numéro du 21 mars consacré aux territoires, Témoignage Chrétien a publié sous ce titre, dans une version abrégée, mon papier publié ici, sous le titre « Maisonsdeserviceaupublix : le visage qui résiste ». En complément de « Numérique, la fracture invisible », l’interview de Jean Deydier, directeur d’Emmaus Connect et de Wetechcare, et avec qui j’avais développé une stratégie d’inclusion numérique au moment du lancement de la prime d’activité, et qui a contribué à son succès.

Les maisons de service au public


La France a développé, à partir du XIXe siècle, des réseaux de services publics de proximité qui ont contribué à faire la République, dont la gare, la poste, la perception, etc. 

L’économie de ces réseaux est particulière ; les coûts unitaires augmentent au fur et à mesure qu’ils s’étendent : atteindre un point reculé du territoire pour un faible nombre d’usagers coûte plus cher que de toucher la population nombreuse des grandes villes. Le coût de leur maintien est de plus en plus élevé, et la privatisation et la mise en concurrence pour les uns, les contraintes budgétaires pour les autres réduisent la capacité des opérateurs à financer ces coûts supplémentaires. Résultat : tels les villages gaulois devant les légions de César, les services publics de proximité capitulent devant l’offensive numérique.
Certains résistent en se regroupant dans des maisons de service au public (MSAP), expérimentées à partir de 2010 et généralisées en 2015 avec la loi NOTRe, et dans lesquelles La Poste s’est engouffrée pour sauver le soldat « postier ». Il s’agit de mutualiser ce réseau de proximité en le mettant à disposition de l’ensemble des opérateurs, ce qui diminue le coût moyen pour chacun. Il s’agit aussi de ne laisser personne au bord du chemin numérique. Généraliser les services numériques suppose que chaque usager ait accès à un ordinateur – tout le monde n’en a pas – et soit connecté au réseau – il reste des zones blanches – pour accéder à des services qui fonctionnent – c’est-à-dire sans bugs –, et surtout sache ou puisse naviguer sur la toile.
Avec 1 350 MSAP aujourd’hui, et 1 900 prévues fin 2019, pourquoi n’ont-elles pas éteint dans l’œuf la colère des ronds-points contre la fermeture des services publics ? Certes, le service est en train de gagner en visibilité, mais il ne constitue pas un réseau homogène, géré par un unique opérateur – cinq cents MSAP sont portées par La Poste, et les autres par les mairies ou des associations ; certains, comme la SNCF ou GRDF, se sont désengagés.
C’est aussi un nouveau métier qui s’expérimente là : on ne transforme pas du jour au lendemain facteurs ou employés municipaux en héritiers des écrivains publics capables d’aider les usagers à s’y retrouver dans la tour de Babel numérique des administrations.
Enfin le modèle économique n’est pas stabilisé : il restera plus coûteux d’assurer ce service polyvalent de proximité que de concentrer les contacts avec le public dans des accueils spécialisés, mais c’est la condition de l’accès pour tous ceux qui ne peuvent s’y rendre. Or, le financement de ces maisons repose sur un équilibre fragile entre des communes qui en assurent de plus en plus difficilement la moitié, l’État, qui n’a pas augmenté sa contribution depuis 2014, et les opérateurs, eux-mêmes soumis à de fortes pressions budgétaires.

Paris, le 21 mars 2019

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