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En revenant des Jeco : pour une information économique et sociale au service de la démocratie.

Comme chaque année depuis dix ans, l’Institut pour le développement de l’information économique et sociale, l’Idies que j’ai le plaisir de présider depuis sa création en 2007, a organisé ses rencontres annuelles dans le cadre des Journées de l’économie, les Jeco, trois jours pendant lesquels Lyon devient la capitale de la pensée économique.

En revenant des Jeco :

pour une information économique et sociale au service de la démocratie.

Avec Philippe Frémeaux, nous avons créé l’Idies, il y a maintenant un peu plus de dix ans, avec l’idée que l’accès à l’information économique et social et sa qualité était un élément essentiel, et insuffisamment perçu, de la qualité du débat démocratique, d’une démocratie qui soit démocratie politique mais aussi démocratie économique et démocratie sociale. Et nous nous sommes donné quatre terrains de jeu, ou plutôt d’observation, sur lesquels nous essayons de déplacer le lampadaire, et qui font l’objet, chaque année de deux tables ronde à l’occasion de nos journées annuelles.

Après avoir abordé l’année dernière celui de l’entreprise (1) (« Quels pouvoirs pour les salariés dans l’entreprise après les lois Macron ? ») et des média (2) (« Quel avenir pour les médias libres à l’heure du numérique ? ») cette année c’était le tour de l’enseignement et des sources :

  • Celui de l’enseignement (3), en l’espèce secondaire, autour de la question de la place des sciences économiques et sociales (« Quelle place pour les sciences économiques et sociales dans le lycée de demain et quelles SES ? ») après la réforme du bac) proposé par Pierre Mathiot , avec ses conséquences en terme de programme, en l’espèce pour les sciences économiques et sociales, dont est chargé Philippe Aghion, et qui fait l’objet d’une opposition de l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales, l’Apses, qui était représentée par son président,Erwan Le Nader et sur lequel nous avons aussi bénéficié du regard rétrospectif d’Elisabeth Chatel.
  • Celui des sources, avec la question, auusi ancienne que ces notions, de la mesure de l’emploi et du chômage (4), et surtout du halo qui entoure ces concepts (« Les nouvelles frontières de l’emploi et du chômage »), à partir de l’évolution des formes d’emploi telles qu’elles sont saisies par la statistiques publique, présentées par Anne Juliette Bessonne de la Dares, avec, en contrepoint l’analyse des évolutions sociétales, et les moyens d’en tenir compte dans la mesure, par Guillaume Duval, avec une focale de Jean-Marie Charon sur l’emploi des journalistes, et les conséquences sur l’activité syndicale et sur les politiques publiques par Martial Garcia de la CFDT.

Je ne vais pas faire ici le résumé de ces deux tables ronde, comme chaque année riches et frustrées du temps trop court pour aller au bout des choses (mais va-t-on jamais au bout des choses ?), mais reprendre mes principales conclusions de ces débats :

  • « Il ne faut pas séparer l’économique et le social » : l’économie est une science humaine, comme la sociologie, comme la psychologie (comme la science politique, a-t-il été ajouté à la première table ronde), et ces diverses disciplines doivent dialoguer, se critiquer et s’enrichir les unes les autres.
  • « Le pluralisme est une condition d’une approche démocratique des enjeux économiques et sociaux » : c’est ce qui a conduit l’Idies a contester la prétention d’une partie de la doctrine économique, le courant mainstream à imposer des critères de scientificité qui ne permettent pas d’interroger les soubassements idéologiques qui ont présidé à leur élaboration.
  • « Les outils, les modèles  notamment, sont utiles et même nécessaires, mais ils sont toujours des représentations simplifiées de la réalité » : en économie, comme en géographie, « la carte n’est pas le territoire », et il faut éviter la fascination que peuvent exercer les modèles, pour éviter de les confondre avec la réalité.
  • « Derrière un chiffre il y a un concept, qui doit faire l’objet d’une appropriation par les acteurs » : les sciences économiques et sociales renvoyant à des réalités quotidiennes, chacun en a une compréhension immédiate, mais incompléte, des notions qu’elles utilisent qui doivent donc être déconstruites et reconstruites ; c’est dire le souci qui doit être donné à la pédagogie des ces domaines de connaissances.
  • « Derrière un concept, il y a une réalité économique, et surtout sociale qui se déforme dans le temps » : c’est le cas de l’emploi et du chômage, qui renvoie à l’évolution des tâches ménagères, aux formes de travail et de relation de travail, des formes de rémunération, des inégalités de la précarité et de la pauvreté, par exemple.
  • « Les concepts, les représentations qu’ils génèrent, alimentent les stratégies des acteurs et les politiques publiques » : et c’est là tout le travail auquel nous essayons de contribuer en réinterrogeant en permanence les notions et les idées reçues.

 

Lyon-Paris, le 8 novembre 2018

 

(1) Voir aussi le rapport 2017 de l’Idies « Démocratiser l’économie », par Julien Dourgnon.

(2) Voir aussi le rapport 2013 de l’Idies « La fabrique de l’information économique », par Jean-Marie Charon

(3) Voir aussi, sur l’enseignement supérieur, le rapport Idies de 2015 « Sortir de la crise de l’enseignement supérieur de l’économie »

(4) Voir la note de l’Idies d’avril 2014 à ce sujet « L’inépuisable controverse sur « le » chiffre du chômage », par Jacques Freyssinet.

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